Lola lit L’île du docteur Faust

Le 30 avril, à la nuit tombée, au port de Douarnenez, Thaïs, Alexandra, Hélène, Katell, Laure, Isabella, Colette et Sydney, la narratrice, embarquent pour l’île Tirnamban au large des côtes bretonnes. Elles vont faire une cure de 6 mois dans la clinique du Docteure Faust qui leur a promis un rajeunissement spectaculaire. L’île est habitée uniquement par les employés de la clinique, Demetra et sa fille Hermione, les gémeaux, Dorian et Bastien, Pascal et Zoyad, et bien sûr la mystérieuse docteure Faust et son assistante. La cohabitation se passe plutôt bien et Sydney, journaliste et romancière, qui a été invitée pour faire un papier sur la clinique et avancer son roman, est la seule à se rendre compte de la bizarrerie de la clinique, les autres pensionnaires étant bien trop occupées à examiner leur visage, à en surveiller les transformations. 

L’auteure nous trimballe entre rêve et réalité, passé et présent, dans une langue tout à fait agréable. L’atmosphère très particulière du lieu et le mystère qui entoure les personnages ont réussi à me troubler dès les premières pages. Peut-être aussi parce qu’il est question du temps qui passe, un sujet qui tracasse (surtout à partir d’un certain âge 😉 Et puis j’ai trouvé la fin très intéressante. Un très bon moment de lecture !

Tout au long de ma lecture, L’horloge le poème de Baudelaire, s’est imposé et ne m’a pas quittée

L’horloge
Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Dont le doigt nous menace et nous dit :  » Souviens-toi !
Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d’effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible,
Le plaisir vaporeux fuira vers l’horizon
Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ;
Chaque instant te dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison.
Trois mille six cents fois par heure, la Seconde
Chuchote : Souviens-toi ! – Rapide, avec sa voix
D’insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,
Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !
Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor !
(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)
Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues
Qu’il ne faut pas lâcher sans en extraire l’or !
Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c’est la loi.
Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi !
Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.
Tantôt sonnera l’heure où le divin Hasard,
Où l’auguste Vertu, ton épouse encor vierge,
Où le repentir même (oh ! la dernière auberge !),
Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard !  »
Charles Baudelaire, Les fleurs du mal

L’île du docteur Faust / Stéphanie Janicot – Editions Albin Michel – août 2021 – 304p

Lola lit On ne parle plus d’amour ♥

Louise épousera Armand-Pierre Foucher le 2 septembre. Elle ne l’aime pas vraiment mais ce n’est pas grave, dans le monde de Louise l’amour n’est pas utile. D’ailleurs son père Olivier Lemarié, président du Yacht-Club, le lui a toujours dit :  » il faut être élégant, prospère et puissant mais il est superflu d’être heureux.  » Alors Louise, l’enfant parfaite, s’accommode mollement des rallyes, régates et autres parties de tennis entre gens de la bourgeoisie bretonne. Elle va épouser Armand-Pierre, lui donner de beaux marmots bien élevés, être une bonne épouse et une excellente mère de famille, se couler dans le droit chemin tracé pour elle par ses parents et son  milieu. La vie de Louise sera donc un long fleuve tranquille… jusqu’à l’entrée en scène de Guillaume du Guénic.

C’est drôle, vif, plein d’esprit et d’autodérision. L’auteur manie avec finesse les registres, il encanaille la langue pour notre plus grand plaisir de lecteur. J’ai ri, j’ai noté plein de phrases que j’ai adoré lire. Un régal !

Mon premier roman de Stéphane Hoffman et sûrement pas le dernier ! Et comme écrit page 75 « Laissez La gravité aux imbéciles : elle leur donne l’impression d’être denses quand ils ne sont que lourds. »


On ne parle plus d’amour / Stéphane Hoffmann – Editions Albin Michel – août 2021 – 251p

 

 

 

Lola lit Au delà de la mer ♥♥♥

Ce jour-là Bolivar, un pêcheur sud-américain aguerri, doit impérativement prendre la mer pour rembourser un type auquel il doit de l’argent et qui a promis de lui couper les oreilles ; c’est une affaire sérieuse. Angel, son acolyte, cuve ses excès de la veille, alors c’est Hector, un adolescent dégingandé qui embarque sur le panga avec Bolivar, au mépris de la tempête qui gronde au loin.

Mais bientôt, au cœur des éléments qui se déchaînent, Bolivar perd le contrôle de l’embarcation. Les deux pêcheurs se réfugient dans la glacière et attendent. Quand le calme revient, ils sont perdus, sans eau, sans nourriture, gps et radio sont hs. Ainsi débute la dérive de ces deux êtres si diamétralement différents et de leur bateau.

Ils vont devoir puiser au plus profond d’eux-mêmes les ressources qui peuvent leur permettre de survivre au milieu de ce tout meretciel confondus, immensément bleu, qui enveloppe, enserre, emprisonne, empoisonne, étouffe, asphyxie. Chacun d’eux s’interroge sur l’homme qu’il a été et qui l’a conduit là, entre espoir et désespoir, entre foi en Dieu ou en la vie. Un face à face suffocant, brutal et animal, d’amour et de haine fragmentés.

C’est un roman terrifiant, angoissant, bouleversant, fascinant, qui a fait remonter en moi des questions existentielles, philosophiques et nécessaires. L’écriture de Paul Lynch est intense, il sait raconter merveilleusement les histoires les plus terribles, les plus extra-ordinaires. Après Grace, que j’avais aimé, mon amour pour cet auteur est absolument confirmé. 


Au-delà de la mer  Paul Lynch – Editions Albin Michel – août 2021 – 232p

Voici le lien qui raconte (beaucoup moins bien 😉 l’histoire incroyable de Salvador Alvarenga, pêcheur saldorien, qui a dérivé 438 jours sur le Pacifique suite à la tempête de novembre 2012. http://www.slate.fr/story/109625/pecheur-seul-mer-438-jours

 

 

 

Lola lit Le charme secret de notre graisse

Le charme secret de notre graisse et son rôle en faveur de notre santé par BoonComment ça ?! La graisse ne serait pas ce monstre répugnant qui s’accroche à nos cuisses, notre ventre et nos hanches comme une moule à son rocher, et que nous combattons avec plus ou moins d’acharnement à coup de régimes, gélules et d’exercices physiques barbares ? C’est bien ce que nous expliquent le docteur Mariette Boon et le professeur Liesbeth Van Rossum. Notre graisse aurait du charme et un rôle bénéfique sur notre santé. Nos cellules graisseuses tant haïes participeraient à des fonctions essentielles de notre corps.

Après cette lecture, je suis convaincue. Attention il n’y a pas de scoops, pas de buzzs, pas de OH HA NON ?! Mais des explications claires, des témoignages de certains de leurs patients, et deux ou trois conseils aussi. Comprendre, c’est un excellent moyen de déculpabiliser.

Le petit bémol, c’est la présentation. C’est un sujet sérieux mais quelle austérité ! Ce long texte presque d’un bloc, sans retour à la ligne, sans alinéa, c’est un peu lourd à lire, heureusement que le sujet est passionnant !

Merci à Babelio et aux éditions Actes Sud

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Lola lit Cache-cache partie

Cache-cache partie par LatteuxUne partie de cache-cache, et Pépin le petit lapin compte jusqu’à 10 pendant que ses petits copains filent se cacher dans la forêt. Lorsque Garou le loup sort d’un trou et s’invite dans la partie.

Une couverture souple, du papier de qualité, le trait est naïf mais expressif, 2 couleurs seulement du noir et du rouge sur un fond blanc. Le texte, sur les pages de gauche, est écrit en rimes comme une poésie, les majuscules et les points sont rouges, délimitant chaque phrase. A droite, les illustrations organisées en vignettes ou en pleine page, apporte de la modernité et du dynamisme.
Le trait est enfantin mais expressif. Les arbres ressemblent à des pommes d’amour, les lapereaux sont craquants et le loup à un petit air bien malicieux.

Quel charmant petit livre ! Porté par une maison spécialisée en lecture confortable, dont « l’ambition est d’aplanir les difficultés de lecture pour que les livres soient toujours synonymes de plaisir, d’émerveillement et d’épanouissement. »
Objectif atteint !

Merci à Babelio et aux éditions Ztl

Lola lit La petite dernière

Voici l’adaptation BD du livre jeunesse de Susie Morgenstern où elle raconte sa vie de petite dernière d’une fratrie de 3 soeurs. La famille est installée à Newark aux États-Unis. Dans les années 50 Susie a une dizaine d’années et peine à trouver sa place entre la jolie Sandra et la rigolote Elfie. Ça se chamaille, ça crie, ça piaille, comme dans toutes les familles et la vie s’écoule tranquillement rythmée par les fêtes juives. Mais bientôt, les choses changent, des cousins s’installent chez eux, européens ils ont fui l’horreur. A l’école, Walter n’est pas gentil, il l’insulte, la traitant de Sale juive ! Susie a peur, elle ne veut plus aller à l’école. Pourquoi toute cette haine ? Susie ne comprend pas et cherche des réponses dans les livres qu’elle emprunte à la bibliothèque.

Une BD pleine de poésie, de naïveté et de mélancolie aussi. Les enfants vont partager la vie de cette petite fille aimée par sa famille qui rencontre des difficultés et doit y faire face.

Lola lit Trio de William Boyd

Brighton été 1968 sur le tournage de L’épatante Echelle pour la lune d’Emily Bracegirdle, le dernier film de Reggie Tipton.

Le trio tourmenté de William Boyd est composé de Talbot Kydd producteur comme papa mais sans panache, qui refoule son homosexualité auprès de sa femme et de ses enfants ; Elfrida Wing, l’épouse tant de fois trompée du réalisateur, écrivaine qui noie ses 10 dernières années de pages blanches dans l’alcool et enfin Anne Viklund une jeune première délicieuse et populaire qui tente d’échapper à son ex-mari terroriste fraîchement sorti de prison.

Les personnages en traînent de la souffrance, de la déprime, du mal de vivre, de la misère morale et pourtant vous allez vous amuser grâce à la plume pleine de l’humour pince sans rire et sophistiqué, de cet auteur so british !

Un roman que j’ai eu énormément de plaisir à lire !


Trio / William Boyd – Editions du Seuil – mai 2021 – 496p

Traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Isabelle Perrin

 

Lola lit La vengeance m’appartient

Maître Susane, quadragénaire célibataire sans enfant, avocate à Bordeaux, voit débarquer un jour dans son cabinet, Monsieur Principaux, le mari de Marlyne Principaux qui attend son procès pour avoir noyé ses trois enfants en bas âge dans la baignoire familiale. Maître Suzane rencontre Marlyne Principaux, et c’est avec stupeur qu’on apprend que cette femme qui n’a pas vraiment de remords, dit avoir quitté l’enfer de sa vie de famille pour l’enfer de la prison qui lui est bien plus supportable.
Mais ce qui choque Maître Susane n’est pas tant le fait divers que la personne même de Gilles Principaux. Serait-ce lui l’enfant de Cauderan qu’elle a croisé dans son enfance et qui lui a laissé un souvenir impénétrable ? Elle ne sait pas car elle ne se souvient de rien, excepté qu’il l’a invitée dans sa chambre. Elle avait 11 ans, lui 14. Mais que s’est-il passé dans cette chambre ? Elle interroge ses parents ; sa mère qui faisait des ménages dans la belle demeure des Principaux, mais celle-ci n’est plus vraiment sure, elle affabule, elle invente. Quant au père, il ne veut pas entendre parler de cette histoire !
Mais que s’est-il passé dans cette chambre ??
C’est un texte spécial, déconcertant, répétitif.
C’est un texte dense, exigeant.

Un texte fascinant.


La vengeance m’appartient / Marie N’Diaye – Editions Gallimard – janvier 2021 – 240p

Lola lit Kérozène ❤

Kérozène par DieudonnéLes stations service sur l’autoroute m’ont toujours fascinée. Elles exercent un fort pouvoir d’attirance et de rejet sur moi. Elles font partie du voyage mais concentre tellement de trucs un peu glauques, à commencer par la lumière des néons qui nous fait des têtes de revenants. En tout cas, à chaque départ en vacances, arrêt obligatoire et après, j’invente une vie à certaines personnes que j’ai croisées. Mais je ne suis jamais allée aussi loin qu’Adeline Dieudonné. Pourtant j’aurais dû me douter que ce nouveau roman, après La vraie vie, me secouerait.

« 23h13. Une station service le long de l’autoroute, une nuit d’été. Si on compte le cheval, mais qu’on exclut le cadavre, quatorze personnes sont présentes à cette heure précise. » On sait dès les premières lignes qu’il va se passer quelque chose de grave, à cause de ce cri poussé dans la nuit « Madame ! » L’auteure nous amène à ce point de convergence grâce à 14 chapitres, un par personnage, écrits comme des nouvelles.

C’est terriblement jouissif ! Grinçant, tordant, piquant, absurde et la plume est belle, un excellent roman ❤❤❤ Adeline, visage d’ange encadré de longs cheveux blonds écoute du Hard Metal quand elle écrit. Qui cela étonne ? 😉


Kérozène / Adeline Dieudonné – Editions L’Iconoclaste – avril 2021 – 257p

 

Lola lit American Dirt ❤

American Dirt par CumminsPrès de 400 pages lues en apnée ! J’ai oublié de respirer, agrippée à mon livre, n’osant plus bouger, dans un état d’urgence. Stress, panique, frayeur, désespoir m’ont accompagnée tout au long de cette lecture. Impossible de lâcher, il fallait que je lise vite parce que c’était tellement douloureux !

Le thème de l’immigration me touche. Grâce à mon métier d’enseignante,  j’ai rencontré des femmes et des hommes, des enfants, des ados, des familles entières, arrivant d’Afghanistan, d’Inde, du Rwanda, de Chine, et plus récemment de Syrie, fuyant la guerre, les tortures, les menaces, la mort, le viol, l’abominable, l’atroce, à pieds, en bus, en bateau de fortune.  Ils m’ont raconté leurs traversées, leurs histoires, insoutenables. Je les ai écoutés, j’ai beaucoup pleuré et ils m’ont consolée.

Alors l’histoire de Lydia n’est pas une fiction, même si les personnages ne sont pas réels, ils existent vraiment. J’ai rencontré des Lydia, des Luca, des Rebecca et des Soledad, et j’ai eu la chance de ne jamais croiser leurs bourreaux.

Lydia, libraire, épouse d’un journaliste reconnu pour son travail, doit fuir Acapulco après le massacre de 16 membres de sa famille par un cartel mexicain. Juste le temps de remplir un sac à dos, elle s’accroche à Luca, son fils de 8 ans et ils prennent la route, la route vers vers El Norte, pourchassés par la mort, qui sera forcément atroce. Lydia et Luca vont faire des rencontres effroyables le long de ce chemin terrible mais ils vont aussi trouver l’entraide et une nouvelle famille. Brrrrr j’en ai encore des frissons !


American Dirt / Jeanine Cummins – Editions Philippe Rey – août 2020 – 396p